Robert Thivierge, le président du Conseil consultatif canadien sur les normes en apprentissage en ligne |
CanCore Conseil consultatif canadien sur les normes en apprentissage en ligne [CCCNAL]): Entrevue avec Robert Thivierge
Traduit par : Karin Lundgren & Suzanne Lapointe
Norm Friesen (NF)
Robert Thivierge (RT)
(NF) Je fais cette entrevue avec Robert Thivierge, le président du Conseil consultatif canadien sur les normes en apprentissage en ligne. Robert, merci du temps que vous m'accordez aujourd'hui.
(RT) C'est un plaisir
(NF) Pour débuter, pourriez-vous nous fournir quelques informations sur l'historique et l'état actuel du CCCNAL.
(RT) Bien sûr. J'aimerais débuter en expliquant pourquoi nous avons créé le CCCNAL. Au Québec, nous avons travaillé sur les normes et standards pour répondre à des besoins bien identifiés dans le secteur de l'éducation. À la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec (CREPUQ; http://www.crepuq.qc.ca/ ), où j'ai travaillé pendant 5 ans, il ressortait de nos observations et de nos études que généralement, le matériel numérique d'apprentissage produit dans nos universités n'est ni partagé, ni durable. Cette situation explique en partie pourquoi il y a très peu de fonds disponibles pour le développement de contenu. On en est dans une sorte de culture du jetable. Les professeurs développent leurs ressources numériques, dans certains cas à grands frais, et avec leurs étudiants, ils en sont le plus souvent les seuls utilisateurs. On constate aussi que le matériel de formation devient de plus en plus perfectionné et qu'avec le recours au multimédia et à des technologies de développement complexes, les coûts de production augmentent. Cela nous conduit à une impasse. D'où le besoin de trouver les moyens de rendre ce matériel durable, de transformer ces « ressources » en « actifs » qui peuvent être partagés. Les pourvoyeurs de fonds seront toujours réticents à investir dans des produits jetables après usage, il seront peut être plus intéressés à mettre de l'argent dans des actifs.
Ces raisons nous ont emmené à réfléchir sur les normes. Avec le soutien du ministère de l'Éducation du Québec, nous avons effectué une étude sur l'application de normes et de standards pour les ressources d'enseignement et d'apprentissage, ce qui nous a emmené à prendre connaissance des travaux du Sous-comité 36 ISO sur le développement de normes internationales des technologies de l'information pour l'apprentissage, l'éducation et la formation (ISO/IEC JTC1/SC36; http://jtc1sc36.org/ ).
L'objectif du CCCNAL est de faciliter le travail collaboratif entre les provinces afin d'identifier les besoins et les exigences communs aux différents systèmes éducatifs en matière de normes et standards. Le CCCNAL prendra les moyens pour identifier ces besoins et ces exigences, pour les communiquer aux instances qui sont responsables du développement de ces normes et pour soutenir ceux qui participent à ces travaux de développement. Nos études ont démontré qu'il y a actuellement plusieurs normes, standards et spécifications disponibles pour répondre à des besoins précis. Mais la situation est complexe et dynamique car la plupart de ces normes et standards sont en plein développement et nous devons nous assurer qu'ils répondent le plus possible à nos exigences. Dans ce contexte, le CCCNAL soutient la participation des représentants canadiens aux travaux du sous-comité SC36 en leur fournissant l'information nécessaire pour orienter leurs travaux en s'assurant ainsi que ces travaux soient ancrés sur la réalité et sur les besoins de nos institutions d'éducation.
(NF) Il y a beaucoup de vos commentaires que plusieurs utilisateurs de CanCore vont partager d'une façon ou une autre.
(RT) Oui, ce sont là des préoccupations importantes et reconnues par tous. La proposition de mettre le CCCNAL sur pied a initialement été soutenue par le ministre de l'Éducation du Québec, Pierre Reid. Il était aussi, à l'époque, le Président du Conseil des ministres d'éducation du Canada (CMEC; http://www.cmec.ca/ ), ce qui lui a permis de présenter cette proposition directement à tous les ministres de l'Éducation. Il en est résulté l'adhésion de cinq provinces pour financer le CCCNAL pour une période de cinq ans.
En fait, le cycle d'investissement de cinq ans est important. Il permet de donner un cadre stable à la participation canadienne dans le travail de développement de normes internationales, ce qui est indispensable pour assurer que les priorités et les exigences canadiennes soient bel et bien prises en compte. Dans le passé, le Conseil canadien des normes (CCN; http://www.scc.ca/ ) et la Direction de l'apprentissage électronique, le Groupe Stratégie du marché de l'apprentissage électronique d'Industrie Canada ont soutenu certaines de ces activités. Mais, malgré leur générosité, les coûts n'ont été couverts que partiellement, et la constance n'a jamais pu être assurée d'une année à l'autre. Le CCCNAL veut assurer que le Canada dispose d'une équipe solide et bien appuyée de ses représentants au SC36.
(NF) Oui; l'importance d'une stabilité à long terme tant au niveau du support que de la représentation est essentielle pour ce genre de travail. Robert, est-ce que vous pourriez m'indiquer les provinces qui soutiennent le CCCNAL ?
(RT) Bien sûr . Le Québec, l'Ontario et l'Alberta sont les contributeurs principaux et membres du Conseil d'administration du CCCNAL. Ils vont jouer un rôle clé dans sa conduite. Le Nouveau Brunswick et la Colombie Britannique sont également membres du CCCNAL et l'appuient financièrement. Toutes ces provinces sont d'accord pour soutenir financièrement ce projet pendant une période de cinq ans.
Lors de notre première rencontre en septembre, nous avons priorisé dans notre plan d'action le recrutement d'autres partenaires. Nous nous sommes demandés : « Quels sont les acteurs qui auront à investir le plus dans le développement de ressources numériques d'éducation et de formation– et qui par le fait même bénéficierait le plus d'une participation au CCCNAL ? » La première réponse est évidemment les ministères d'éducation des provinces. Le deuxième groupe est composé des ministères et organismes impliqués dans la formation. Au Québec par exemple, nous avons Emploi-Québec, qui est un ministère important, qui dépense des centaines de milliers de dollars en formation chaque année ; il est donc un joueur majeur dans l'industrie de la formation.
Il y a aussi le secteur privé, c'est-à-dire les entreprises du secteur de l'apprentissage en ligne qui, bien que travaillant sur une petite échelle, possèdent une expertise importante et sont présentes sur le marché international. Mais, comme je l'ai déjà mentionné, pendant la première année, nous visons d'impliquer les ministères d'éducation, et quelques grandes organisations publiques et privées impliquées dans la formation.
(NF) Bon. Comme vous le savez, cette entrevue fait partie du travail exécuté dans le cadre de CanCore. Pourriez-vous décrire comment CanCore pourrait être lié au CCCNAL et comment ces deux initiatives peuvent s'enrichir mutuellement?
(RT) En fait, CanCore a développé beaucoup de connaissances et d'expérience et a fait pas mal de recherche et de développement dans le domaine des normes et standards en apprentissage en ligne. Il est certain que lorsque les ministères d'éducation définissent et communiquent leurs exigences à l'équipe SC36, CanCore – qui a déjà une bonne connaissance des besoins et qui connaît les problématiques de ce domaine – peut faire une contribution importante. Remarquez que le CCCNAL n'est pas un regroupement des organisations qui sont déjà actives dans le domaine des normes et standards tels que CanCore et le Groupe de travail sur les normes-Québec (GTN) avec Normetic. Le but du CCCNAL est d'amener les provinces et les autres partenaires importants dans le domaine de l'apprentissage, l'éducation et la formation, à travailler de façon coordonnée à l'identification de leurs besoins et à la formulation de leurs exigences communes en matière de normalisation et de les faire connaître aux instances concernées. Les initiatives telles que Cancore et Normetic vont travailler ensemble avec nous à l'atteinte de cet objectif.
Un deuxième objectif important du CCCNAL est de soutenir les ministères de l'Éducation dans leurs efforts de promotion de l'utilisation de ces normes et standards. Ces ministères provinciaux sont les mieux placés pour accomplir cet objectif parce que ce sont eux qui financent le développement des ressources numériques d'enseignement et d'apprentissage et qui sont responsables des politiques qui régissent les investissements, le développement et l'approvisionnement de ce matériel. Quand vous disposez d'un tel levier et que vous avez une vision claire de l'importance des enjeux de la normalisation, vous êtes dans une bonne position pour agir car il y va de vos propres intérêts.
(NF) Super, une dernière question: Vous avez mentionné SC36 des multiples fois. Avez-vous l'intention de travailler de façon similaire avec IMS ( http://www.imsglobal.org ) ou bien IEEE LTSC ( http://ieeeltsc.org/ ) ou d'autres organisation de même genre ?
(RT) Oui. Le document sur la mission et les objectifs du CCCNAL identifie le groupe SC36 comme l'organisation principale. Mais le SC36 travaille en liaison avec IMS et IEEE. Alors dans notre plan d'action il est indiqué que nous allons identifier des organisations qui peuvent être en mesure de répondre aux besoins du monde de l'éducation et travailler avec eux. En même temps, dans une perspective de faciliter le partage et les échanges de ressources éducatives tant à l'intérieur du Canada qu'entre différents pays, il est important de travailler dans un cadre qui est explicitement et résolument international et d'adopter des approches aussi universelles que possible.
(NF) Excellent. Merci beaucoup Robert!